Hosni ZAOUALI, le vagabond de la Silicon Valley

Propos recueillis par Amina Mehali / Medianawplus

« Mon attachement à la Tunisie et à l’Afrique est presque viscéral. Mes parents ayant tout quitté pour faire les petits boulots en France, ça n’a pas été facile pour 5 frères et sœurs vivant dans un quartier type ghetto (…) Moi le vagabond de la Silicon Valley, je gère aujourd’hui une compagnie qui crée la Métaverse – Tech-Adaptika.

Je suis aussi consultant pour Stanford University et différentes organisations sur l’impact des nouvelles technologies sur le monde du travail et le monde de l’éducation. » Ce témoignage résume, à lui seul, la tenacité et le caractère combatif au sens noble du terme de Hosni ZAOUALI, un jeune entrepreneur, un « self-made man », qui mise sur les Métaverses pour bouleverser les schémas conventionnels de l’enseignement. Il s‘appuie sur Tech-AdaptiKa, une entreprise qu’il a créée pour mener à bien et concrétiser ses objectifs professionnels dans ce vaste domaine qui échappe à plus d’une personne lambda.
Le parcours atypique de Hosni ZAOUALI force le respect et interpelle sur le génie de cet enfant d’émigré tunisien qui s’est construit tout seul et a cassé le carcan dans lequel il était enchainé.

Certaines personnes issues de l’immigration versent dans l’art et notamment la musique, d’autres dans le sport et en particulier l’athlétisme, le football et la boxe et d’autres encore à l’image de cet enfant prodige, s’orientent vers la « matière grise », la technologie, l’intelligence artificielle. Un choix qui est devenu une vocation, une passion, une profession et un parcours de vie, avant de se métamorphoser en une raison d’être.
Issu d’une famille plus que modeste avec une fratrie de cinq enfants, un père ouvrier dans un chantier, une mère au foyer élevant ses cinq enfants, Hosni ZAOUALI se trouve propulsé à la Silicon Valley, jonglant avec les logarithmes et cohabitant avec le monde du virtuel pour le rendre réel.
Il nous livre dans cet entretien accordé à Medianawplus, un témoignage qui risque de nous faire aimer ce monde de la Métaverse. Les initiés peuvent y trouver leur compte et les profanes ont la possibilité de nourrir leur curiosité.

Medianawplus : Que représentent pour vous les Métaverses et l’intelligence artificielle, et comment les mettez-vous à profit dans le domaine éducatif ?

Hosni Zaouali : Les métaverses vont complètement bouleverser le monde et l’internet. Nous allons passer d’un internet en 2D, au web 3D en 2 ans. Cette nouvelle économie représente aujourd’hui 8 milliards de dollars et va représenter 30 trillions de dollars d’ici 2031. Il est indispensable que les pays du Maghreb, dont la Tunisie mon pays natal, s’y intéressent et ne ratent pas cette opportunité qui va durer 4 ans.

Le métaverse de Tech-AdaptiKa, l’entreprise que j’ai créée, est la meilleure option aujourd’hui. Elle permet aux utilisateurs d’avoir un avatar, de marcher dans des mondes virtuels, de parler à qui ils veulent, d’acheter, d’étudier, de travailler ensemble, comme dans la vrai vie… et tout cela sans lunettes juste avec un téléphone intelligent ou un ordinateur.
En utilisant notre métaverse, les grands groupes peuvent vendre, marqueter, explorer et gagner un avantage compétitif sur leurs concurrents.
Les universités elles, peuvent multiplier le nombre d’étudiants par 10 et augmenter leurs revenus et leur notoriété vu que les étudiants viennent de partout.

Parlez-nous de votre parcours de la Tunisie à la Silicon Valley en passant par la France ?

H.Z : Mon attachement à la Tunisie et à l’Afrique de manière générale est presque viscéral. Mes parents avaient tout quitté pour faire les petits boulots en France, ça n’a pas été facile pour cinq frères et sœurs vivant dans un quartier à la limite d’un ghetto. Ça n’a pas dû être facile non plus pour mes parents. Pendant des années, mon père s’est cassé le dos sur les chantiers de construction et ma mère essayait tant bien que mal d’élever cinq enfants dans un environnement hostile et violent. Ayant vécu entre la Tunisie et la France, nous avons tous souffert d’une crise identitaire qui nous suit jusqu’à aujourd’hui. La France est pour moi comme une mère abusive. Je l’aime, mais elle me le rend souvent mal, trop mal.
A l’adolescence, les violences de rues tournent mal. Un jour, j’ai « expédié » un adolescent du quartier à l’hôpital. Déféré devant la justice, cette dernière m’a contraint à me rendre au poste de police et au tribunal avec ma mère qui ne comprenait pas le français. Cet épisode m’a vraiment affecté. Voilà pourquoi il représente un tournant décisif dans ma vie.
Après plus d’un an de procès, la juge chargée de l’enquête me donne le choix à faire sur le champ : la prison juvénile ou un programme de sport-étude au lycée du centre-ville. Comprenant qu’il s’agissait d’un moment décisif de ma vie, le choix était vite fait. Envoyé en école sport-étude (ndr : natation et athlétisme), je ne passais presque plus de temps dans mon quartier d’origine. Mes fréquentations changent. Avec huit entraînements par semaine et les compétitions le week-end, j’ai appris à me redécouvrir et à canaliser ma rage dans le sport et les études.
Je finis par obtenir un baccalauréat scientifique (série S) à l’âge de 17 ans. A la fin de l’année du bac, ma mère tombe gravement malade. Je décide donc de rester à Chalon-sur-Saône pour me rapprocher de ma famille et je m’inscris en IUT de Génie industriel et nucléaire. Deux ans plus tard, la santé de ma mère s’améliorant et mon DUT en poche, je décroche le concours de Sup-de-Co à Toulon. Les 2 premiers élèves de la promotion avaient accès à une bourse d’étude supérieure pour suivre un 3ème cycle en Amérique du Nord. Je redouble d’effort pour obtenir le sésame et atterri en 2008 au Canada et dans la Silicon Valley que je ne quitterais plus…

Quelle relation entretenez-vous avec votre pays natal ?

H.Z : J’adorerais avoir des projets dans mon pays, mais aujourd’hui je travaille dans la Silicon Valley et à Toronto. Notre entreprise est valorisée à plusieurs dizaines de millions de dollars, et on me paye pour parler aux quatre coins du monde sur les opportunités qu’apporte l’IA (Intelligence artificielle) et des Métaverses. Cependant, je n’ai jamais reçu d’invitation de ma Tunisie bien-aimée.s
J’espère que cela va changer, car la Tunisie a besoin de sa diaspora et pas que pour passer des vacances et dépenser leur argent. Cette diaspora tunisienne a voyagé dans le monde entier, elle est bilingue, multiculturelle. Elle peut ouvrir des marchés totalement inaccessibles pour la Tunisie et mettre notre pays sur les rails du progrès, de la prospérité et la science.

Quel est votre objectif le plus cher sur le plan professionnel ?

H.Z : Je veux révolutionner l’éducation et le développement professionnel, rendre la vie de millions de personnes un peu plus supportable.
Témoignant d’une demande croissante et voyant la pénétration qu’allait avoir internet, je me suis dit qu’il fallait absolument créer une solution en ligne originale. Pour cela, il m’a fallu creuser au plus profond du côté émotionnel de l’étudiant en ligne et comprendre le travail des enseignants. Toute cette empathie a donné naissance à une nouvelle méthode aujourd’hui reconnue par tous : la métavers éducative.
Tech-AdaptiKa se porte très bien aujourd’hui. Je passe donc mon temps aux quatre coins du monde pour sensibiliser aux opportunités, mais aussi aux risques des métaverses.

Puisque vous êtes entre la France et les USA, un enfant de l’émigration en sorte, quel est votre message aux jeunes issus de l’émigration et qui se cherchent une voie salutaire dans une société qui n’est pas toujours ouverte à l’autre différent ?

H.Z : Nos quatre pays (la France, la Tunisie, l’Algérie et le Maroc) sont passés à travers beaucoup de changements ces dernières années. Il y a une autre révolution, bien plus importante qui est en train de se dérouler sous nos yeux. Une révolution technologique qui a le pouvoir de placer la Tunisie, l’Algérie, et le Maroc comme acteurs incontournables du futur ou…  de nous ramener au moyen âge. C’est à nous, Marocains, Algériens, Tunisiens, mais aussi Français, d’amener le Maghreb à prendre le train en marche.
Je sais de quoi je parle, moi le vagabond de la Silicon Valley. Je gère aujourd’hui une compagnie qui crée la Métaverse – Tech-Adaptika. Je suis aussi consultant pour Stanford University et différentes organisations sur l’impact des nouvelles technologies sur le monde du travail et le monde de l’éducation.

Métaverse et Intelligence artificielle.  Ces deux vagues ont le pouvoir de changer la destinée de nos trois pays. Cependant, nous n’avons pas beaucoup de temps. Cinq ans au maximum pour s’y mettre ou sinon on rate cette opportunité historique. Pour cela, il faut que nos décideurs publics se réveillent. Vous savez à quel point c’est frustrant pour moi d’entendre des décideurs publics dire : « je n’aime pas le terme intelligence artificielle, je préfère l’intelligence humaine ». Ce serait un peu comme dire : je n’aime pas voyager en avion, je préfère ma marche à pied. J’ai peur que ce genre de message, ce genre de manque d’ouverture nous laisse en marge du développement économique des 20 prochaines années.

Aujourd’hui, il est plus qu’urgent de nous débrouiller comme on veut pour installer la 5G et capitaliser sur les Métaverses et l’intelligence artificielle. Si on ne le fait pas, la Tunisie, l’Algérie, le Maroc et même la France deviendront des colonies digitales des USA et de la Chine.

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